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Il était une fois les libraires vus par un éditeur neuf…

Librairie Libralire au116, rue Saint Maur – 75011 Paris

Avant de vous conter une histoire de libraires – une histoire de libraires qui accueillent un éditeur -, veuillez considérer en préambule que la maison d’édition Fables fertiles a actuellement le statut d’auto-diffuseur, ce qui signifie pour elle aller à la rencontre des libraires, leur présenter textes, contextes, ligne, ambition…

N’en jetez plus !

Et l’accueil des libraires, dans la très grande majorité des cas et de la courte expérience du serviteur de la Maison présentement posé derrière ce clavier, est attentif, bienveillant. Il est bien souvent très réservé, en revanche, en ce premier semestre 2022 et au sortir d’une année 2021 dynamique au cours de laquelle les libraires, dans leur très grande majorité, firent entrer beaucoup de titres en stock. Or, à un peu plus d’un mi-parcours de ce premier semestre 2022 plutôt atone, ledit stock ne baisse guère en beaucoup de lieux, et invite par conséquent un nombre certain de libraires à vous faire entendre un : “N’en jetez plus!”, lorsqu’ils vous voient, du fait d’une difficulté à assurer une rotation de titres équilibrée.

Libraire est assurément une profession de l’engagement, mais aussi une économie fragile.

Cent libraires, cent regards…

Il n’empêche. La plupart des libraires rencontrés ont vite décelé la fragilité, au moins tout autant établie, d’une aventure naissante comme celle des éditions Fables fertiles ; la très relative maîtrise par son fondateur, pour ne pas dire plus, des codes de ce qui fait un bon représentant – fondateur seul à la barre du navire – de l’embarcation – avec, pourtant de précieux passagers à bord, déjà. Telle situation a pu emporter divers effets auprès des libraires, comme le regard attendri ; empathique ; indifférent ; agacé.

Librairie Le Marque Page, 8, rue de Toiles à Quintin (22800)

Sur Paris par exemple, la gérante de la librairie Libralire de la rue Saint Maur a porté un regard à la fois attentif et bienveillant sur les deux première parutions (les parutions), qui a décidé, après avoir vu les livres – et mon regard encore allumé – d’une mise en place manifestement engagée, du type : « on prend, on voit », le sourire complice, lorsque telle autre librairie parisienne, qui fit bon accueil, finit par me dire après deux relances que les livres étaient de très belle facture ; que les textes semblaient très intéressants, mais qu’elle se devait d’être claire avec moi : « ce qu’aiment nos clients, on le voit bien, ce sont les livres des maisons d’édition bien installées et je ne vais donc pas pouvoir prendre vos titres, j’en suis désolée ! ». À en ramasser vos bras tombés, simplement – à prendre votre reste sans même demander, dépité, quelque conception du rôle de libraire se cache derrière tel propos.

Puis tel autre libraire, encore, comme la librairie Le Marque Page de Claire et Gilles à Quintin, en Bretagne, qui n’oublient jamais qu’ils gèrent une entreprise tout en luttant contre la seule « loi » supposée du « pousse-caddie » à qui il faudrait vendre l’incontournable produit fabriqué tout spécialement pour lui par la maison d’édition… bien installée. Claire m’écoute ; nous échangeons ; elle s’étonne un peu que je sois tant au fait de leur projet de libraire et des valeurs qui le fondent ; Gilles regarde ensuite, puis il commande, pour continuation de sa démarche, soit ne pas faire entrer du titre pour faire entrer du titre, mais regarder et savoir défendre un livre parce que le temps de le connaitre est pris ; soit de s’engager pour donner à voir et à lire ce qui ressort d’une diversité éditoriale ; accompagner et soutenir les maisons d’édition indépendantes lorsqu’il décèle volonté, une qualité.

Mais c’est notre métier !

Librairie L’écume des pages au 174, Bd. St. Germain, 75006 PARIS

Puis de se voir en cet autre lieu, présentant et argumentant, encore, encore et encore, lorsque le libraire de l’enseigne L’Écume des pages à Paris vous coupe rapidement, avec force bienveillance, la parole, vous expliquant qu’il a vu les livres, qu’il les a parcourus, qu’il va les prendre « de toute façon », en mettre un un peu plus en avant que l’autre, l’un emportant un petit supplément de conviction de sa part. « Ah ! mais très bien, merci ! », s’entend-on alors répondre benoitement, déstabilisé. Puis ce même libraire de préciser sereinement : « Mais c’est notre métier ! ». Et lorsque vous humez ensuite, en client, la librairie, vous comprenez que l’affirmation n’est en effet pas que de posture : les actes sont posés, bien visibles, bien matérialisés, et cela fait grand bien.

Espèce à protéger

Ce monde (non, pas le monde des libraires : le monde, tout court !) sait être beau, mais il faut des humains pour le faire beau, alors soyons attentifs à ce que ces humains-là ne deviennent pas une espèce endémique – soyons attachés à faire au mieux pour en être, nous-mêmes, selon ce bon vieil adage que le changement commence par soi. Merci aux libraires, car ces quelques qui ne portent pas ce qu’ils seraient supposés n’apparaissent que comme l’éclatante confirmation du beau métier de libraire et de toute l’estime qu’il m’inspire.

2 Comments

  • Jean Marie Schmitt
    Posted 23 avril 2022 at 16h27

    Quel bel article.
    J’essaie d’être concis..

    • Post Author
      Ig Dai
      Posted 23 avril 2022 at 17h06

      Essai réussi, ce qui ne rend en rien visite et mot concis moins touchants… Merci ! 🌞

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