Les éditions Fables fertiles fêtent en ce mois d’avril 2023 les un an d’existence du catalogue.
Cette date anniversaire est l’occasion de vous proposer un Il était une fois, mettant en mots l’histoire d’une conception graphique originelle venue illustrer, en pratique, une ligne éditoriale. C’est aussi l’occasion de rendre un hommage au livre-objet au regard d’enjeux numériques du temps, protéiformes, présents à nous et tout à la fois fondamentalement insaisissables à défaut de n’être dignes d’attention, d’intérêt. L’invention du livre, elle, est efficace, qui a traversé de redoutables épreuves multiséculaires. L’objet-livre a partie liée avec une quête longue de perfection que sa stabilité tendrait à nous faire concevoir comme quasi réalisée.
S’agissant donc de la genèse d’une conception graphique, la maison est partie d’une page blanche afin de concevoir une identité artistique et graphique dont l’ambition serait de soutenir puissamment la ligne éditoriale – page blanche selon un credo consistant premièrement à offrir une expérience de lecture optimale au plus près du texte, des mots.
Aussi la structure du livre a été voulue aérée, défrichée, de façon à honorer l’espace pour l’écriture et à offrir un véritable confort de lecture. Il s’agissait d’une certaine façon de faire silences et de prémunir le lecteur de tout geste conceptuel, graphique, étriqué, nerveux, agressif.
Dès la première de couverture, par le jeu d’une ligne vert-bleu, un cadre est posé, mais ce cadre est ouvert, et ouvert dans le sens d’ouverture du livre : il est invite. Il ne délimite que les deux tiers d’un périmètre afin de libérer l’espace recevant le nom de l’auteur et le titre de son ouvrage.
En bas de cette même première de couverture, le tiers de ligne qui apparaît forme en son extrémité une courbe ascendante telle une brindille qui lève. La ligne lève vers la fable qu’amène le logo de la maison, logo qui mêle l’encre noire textuelle et un vert-bleu qui symbolise la fertilité. Le double « f » est de l’ordre d’une recherche gémellaire, dont la ligne éditoriale aurait pour mission de réaliser la fusion.
La vision fondatrice du livre portée par Fables fertiles se manifeste ensuite dans le traitement de la matérialité du livre-objet. Le corps du livre – livre-corps – donne son relief à l’expérience tactile. Un grain.
Une fois le livre ouvert, le regard du lecteur plonge vers le centre du livre par l’effet du Petit fond dont la marge, plus étroite, renoue avec la conception issue de la Renaissance et mobilisant le nombre d’or, le « canon des ateliers », dans la distribution des espaces et des blancs, lesquels occupent une place prépondérante autour du texte. Comme l’écrivait Paul Valéry, « Le plus important dans les livres, ce sont les vides. », et les étendues de blancs, ces présences-absence aux signes transcrits, ont été soignées.
Le traitement du texte, lui, vise le confort de lecture du fait, d’une part, d’une police de caractère avec sérif plutôt sobre et très semblable, mais différente, à une police de caractères communément utilisée en littérature, et d’autre part par la taille des caractères ou encore l’interlignage, qui permettent un accès au texte sans que le lecteur ait trop à « tirer » sur les yeux.
Les collections, enfin (« Luttéraires » et « L’heure des contes », à ce jour), proposent une esthétique sobrement déclinée de la charte graphique générale tout en apportant d’autres jeux de couleurs, notablement dans l’utilisation d’une colonne verticale, laquelle point, en bas à droite de la première de couverture, telle une flamme stylisée. « Luttéraires » adopte le rouge symbolisant la lutte lorsque « L’heure de contes » affiche un pastel marquant un détour propre au conte qui insuffle l’idée d’une tranquillité, qu’il serve ou non l’intranquillité.
© GD pour Fables fertiles, avril 2023